Farle Ingalsse est réputé pour bien des choses, et l'une d'entre elles est la plantation de piquets. En fait, Farle a planté tant de piquets dans sa longue vie qu'on se demande comment il reste des espaces libres. Pourtant il en reste.
Farle n'est pas la seule personne qui ait été inspirée par l'art du maillet. En effet, un certain trool du nom de Gbert l'avait observé durant longtemps. Dans la tête du trool, évidemment, l'action de planter ne s'associaut pas forcément à des piquets en bois. Ce que les trools adorent planter, ce sont les aventuriers. Gbert n'était guère différent des autres trools sinon que...
Quand on plante un Iop,
Il éclate comme un blop
Quand on plante un éca,
Il se fend en trois
Quand on plante un eni,
C'est vraiment trop petit
Quand on plante un panda,
Il se met de guingois
Quand un plante un enu
On se le rentre dans le c...
Héhé...
Mais si on plante un féca,
Il reste bien droit.Gbert délaissa donc les aventuriers pour centrer son matraquage publicitaire sur les fécas.
Bientôt les environs de Litneg se couvrirent de fécas plantés en rangs d'oignon, avec entre les fesses un panneau indiquant :
"Vizité Litneg an nivert, sé plu charman" - Personne n'en doute, n'est ce pas? Les aventuriers ne se pressaient pas pour visiter malgré cette campagne publicitaire plus que voyante. C'est que les trools ont une fâcheuse réputation de briseurs de noix et les aventuriers tiennent à les garder entières. Il faut bien en garder pour les bwaks, bworkys et autres familiers.
Néanmoins, cette florissante plantation n'était pas du goût de tous, et surtout pas de celui de Clustus, roi de Bonta. Il envoya la milice afin de se débarrasser de cet "odieux spectacle qui blesse la vue et heurte le regard" - car les rois aiment les phrases longues qui ne font que répéter des lieux communs. Ce qui fut fait : la milice s'arma de torches et mit le feu aux plantations de fécas, les réduisant en cendres. Une délicieuse odeur de féca grillé planait dans l'air... Il se mit alors à pleuvoir comme jamais il n'avait plu en Amakna (où il ne pleut normalement jamais, je vous le rappelle). L'eau dégoulinant sur le sol s'imprégna des effluves de féca grillé et forma, de ci, de là, des flaques d'un noir d'encre.
Gbert était anéanti par la perte de sa plantation et pensait déjà à aller raser Bonta, quand attiré par l'arôme d'une flaque, il eut la curiosité d'y goûter. C'était super bon, et une fois réchauffé encore meilleur!
Gbert en oublia sa vengeance et commença à expérimenter avec ce breuvage. En y versant de l'eau bouillante, ça devenait encore plus fin, et on pouvait y ajouter du miel, du susucre, du lailait... Pas des oignons car ça se marie mal avec le féca.
Gbert raffina aussi le grillage de fécas qui prit le nom de trooléfaction. Un féca bien trooléfié donne un féca de première qualité. Bien moulu entre deux pierres plates, il fournit un nectar qui en plus réveillerait un chafer.
C'est ainsi, que, dans notre bon pays d'Amakna, non loin de la cité de Bonta, un trool un peu moins frustre que les autres inventa un breuvage qu'aujourd'hui encore Ness Lay, l'alchimiste, tente veinement de reproduire avec son Ness'Féca.
Aucun féca n'aurait pu égaler celui du doué Gbert.
Note de l'auteur : Cette histoire rocambolesque et néanmoins authentique me fut racontée par Gbert en personne alors que je partageais sa cellule dans les geôles de Bonta.